Antonio Lizana fait ses débuts dans la musique à un jeune age. À Cadiz, sa ville natale, le flamenco fait partie du paysage sonore et culturel de toute la population. Comme si ces rythmes étaient transmis dans le sang au fil des générations, au sud de l’Espagne, le flamenco emplit l’air des villes et les teinte de sa couleur. Mais, à l’origine de la passion que Lizana a cultivé pour la musique, il y a eu, dans un premier temps, le rock symphonique des années ‘70, Camarón et Paco de Lucía.
C’est à travers le rock qu’il décide de prendre le saxo, attiré par la versatilité de l’instrument, et qu’il commence progressivement à s’intérésser au jazz. Au cours de ses années de formation, naturellement, cet intérêt, né d’une curiosité pour l’improvisation, devient une vraie passion qui lui mène à s’approprier ce répertoire. Tandis que, parallèlement, dans son cercle intime, il est entouré et il commence à gagner sa vie en jouant du flamenco. Avec ce dernier, il entretient dès le debut une relation intime et qui se développe organiquement. Il découvre, en jouant des bulerías, des tangos ou des sainetes, qu’il lui est facile de reproduire ces mélodies, comme si, quelque part, ces rythmes dormaient déjà en lui et il les avait seulement réveillés en appuyant sur les touches de son instrument. C’est ainsi que les deux univers qui colorent sa musique, commencent à cohabiter en lui et à se nourrir l’un de l’autre, dans une démarche qui lui permettra, au fil du temps, de les fusionner pour créer son propre style.
À l’entendre parler, on sent l’amour et la générosité avec lesquelles Antonio Lizana conduit sa pratique musicale. Demandé de se definir dans un genre ou l’autre, il prefère dire que ce qui lui définit est le contexte, “de me definir serait de me limiter”. C’est peut-être cette fuite de cases et des lieux communs qui rend ses créations permeables aux différentes sensibilités qu’il cottoie et aux traditions musicales qu’il ose aborder.
En préparation de son concert au festival de jazz de Saint-Louis, Cultura Dakar, la section culturelle de l’ambassade d’Espagne au Sénégal, lui a adressé quelques questions pour approfondir sur son approche aux différentes scènes sur lesquelles il se produit, sa relation avec le public et ses attentes pour le show du 26 mai à la Place Baya de Ndar.
Votre musique et vos concerts sont souvent décrits comme “un voyage extraordinaire entre flamenco et jazz” et, pour vous présenter dans les différents festivals où vous participez, on cite les prestigieuses scènes sur lesquelles vous vous êtes produit et les nombreuses destinations que vous avez visité. Je voudrais vous demander, de tous ces endroits où vous avez amené votre musique, où est-ce que ça vous a plu le plus de jouer et où est-ce que vous voudriez vous faire écouter pour la première fois.
J’ai vécu de belles expérencies dans toutes les latitudes. Mais il est vrai que dans les pays aux climats chauds, les gens ont tendance à être plus ouverts et participatifs, ce qui te fait sentir beaucoup d’énergie venant du public.
C’est pour cela, entre autres raisons, que j’ai hâte de jouer au Sénégal et voir comment les gens sentent ce que l’on fait.
Quelle est votre relaton avec l’Afrique et, plus particulierement, avec le Sénégal et sa musique ? Y-a-t-il un musicien senégalais avec lequel vous voudriez jouer spécialement ?
Ma relation avec l’Afrique commence au Maroc, car je suis amoureux de la musique Gnawa, shavi et de la tradition des orchestres andalousies.
En musique sénégalaise, je suis familiarisé avec le travail de l’Orchestra Baobab et Youssou N’Dour, avec lequel j’aimerais partager de la musique.
Dans d’autres entretiens, vous expliquez la similarité mélodique du saxo et du cante flamenco sur laquelle vous jouez et qui rend organique la fusion jazz-flamenco dans votre musique. Dans ce sens, et ayant en tête la fusion de votre musique avec le mbalax, croyez-vous que tous les genres peuvent jouer ensemble ? Comment abordez-vous la collaboration avec musiciens d’origines et sonorités différentes dans votre pratique musicale ?
Dans la fusion de musiques, les instruments ne sont pas si importants. Ce qui est important c’est que le musicien ait une certaine flexibilité mélodique, rythmique et expressive pour être capable de se mimétiser à des ambiences qui diffèrent de sa tradition. Quand cela se produit, les musiques peuvent fusionner avec naturalité.
Quel répertoire allez-vous présenter au festival de jazz de Saint-Louis et qu’est-ce que vous voudriez expérimenter et transmettre au public qui se rendra à votre show ?
Nous allons jouer une sélection de mes compositions des différents albums, avec danse et touches du flamenco traditionnel, de sorte à transmettre notre meilleure énergie au public pour vivre tous un moment inoubliable.
Le quintet d’Antonio Lizana sera sur la scène principale du Jazz Saint-Louis le prochain vendredi 26 mai 2023 à 23h.